Photographies habitées
La photographie contribue à la découverte d’un monde encore méconnu de l’Occident à la fin du XIXe siècle.
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La photographie contribue à la découverte d’un monde encore méconnu de l’Occident à la fin du XIXe siècle.
Très rapidement après la mise au point des procédés photographiques, la photographie connaît un formidable engouement et se démocratise. Son essor est contemporain du mouvement d’exploration du monde de la seconde moitié du XIXe siècle. En dépit d’un temps de pose encore relativement long, cette technique permet de saisir comme jamais auparavant la vérité de lieux, d’hommes ou de situations observés dans des pays jusqu’alors peu connus voire méconnus des Occidentaux.
Voyageurs solitaires, explorateurs de missions scientifiques, commerciales ou militaires utilisent la photographie pour documenter leurs déplacements et témoigner de façons de vivre, de cultures différentes de la leur. De nombreux Européens, français notamment, vont partir installer leur studio photographique à l’étranger comme le Gardois Félix Bonfils à Beyrouth dès 1867 ou Edouard Bidault de Glatigné à Aden en 1878. Leurs clichés alimentent les collections conservées dans des institutions telles que la Société de géographie ou le Musée ethnographique du Trocadéro à Paris. Leur dimension ethnographique est aujourd’hui considérée comme incontestable.
Cette exposition offre l’occasion de découvrir la richesse documentaire des clichés réalisés dans la corne de l’Afrique dans les années 1880. De nombreuses photographies originales sont présentées, notamment la série sur le Choa par Léon Chefneux, ou la collection de l’entomologiste Maurice Maindron sur Obock et Tadjourah, acquise récemment par Carré d’art Bibliothèque. D’autres, comme celles de Bidault de Glatigné, sont visibles en tirages agrandis ou en projection.
Cette production a-t-elle influencé Rimbaud dans son désir de pratiquer lui aussi la photographie ? Les quelques clichés que nous connaissons de son expérience de photographe à Harar en mai 1883 nous incitent à le penser.
Quant à l’explorateur nîmois Paul Soleillet, s’il n’est pas photographe lui-même comme son compatriote Georges Révoil, il participe également à la collecte pré-ethnologique d’informations sur les populations africaines en transmettant des photos prises par d’autres à la Société de géographie et en recueillant de nombreux objets qu’il dépose au Musée ethnographique du Trocadéro.